Un cas de pseudo-anévrysme hépatique traité par embolisation percutanée chez un enfant polytraumatisé

May 25, 2017 | Autor: Peter Meyer | Categoría: Interventional Radiology, Ct Scan, Clinical Sciences, Direct Injection, Surgical Treatment
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Descripción

Cas clinique

Ann Fr Anesth Réanim 2001 ; 20 : 786-90 © 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0750765801004853/SCO

Un cas de pseudo-anévrysme hépatique traité par embolisation percutanée chez un enfant polytraumatisé B. Baha1, P.G. Meyer1*, F. Brunelle2, G. Orliaguet1, J.L. Michel3, P. Carli1 1

Département d’anesthésie-réanimation, hôpital des Enfants Malades-Université Paris V, 149, rue de Sèvres, 75745 Paris cedex 15, France ; 2service de radiopédiatrie, hôpital des Enfants Malades-Université Paris V, 149, rue de Sèvres, 75745 Paris cedex 15, France ; 3service de chirurgie pédiatrique, hôpital des Enfants Malades-Université Paris V, 149, rue de Sèvres, 75745 Paris cedex 15, France

RE´SUME´ Les pseudo-anévrysmes artériels hépatiques sont des complications rares et de révélation souvent tardive des traumatismes abdominaux fermés chez l’enfant. Nous rapportons un cas diagnostiqué au quinzième jour chez un piéton polytraumatisé de huit ans renversé par un véhicule léger. Un traumatisme abdominal sévère responsable d’un collapsus initial nécessitait une laparotomie en urgence qui retrouvait une fracture hépatique et des lésions jéjunopancréatiques associées. Si les suites immédiates étaient simples, la survenue au quinzième jour d’une hémobilie imposait une exploration scanographique qui évoquait le diagnostic. Un pseudo-anévrysme implanté sur la branche gauche de l’artère hépatique était confirmé par l’artériographie. L’impossibilité de pratiquer une embolisation par cathétérisme sélectif, faisait pratiquer un abord transcutané direct de l’anévrysme qui permettait de réaliser une occlusion totale. Cette technique est une alternative intéressante à l’embolisation classique et permet d’éviter un traitement chirurgical dont la morbidité est importante. © 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS abord percutané / embolisation / enfant / hémobilie / pseudo-anévrysme hépatique / traumatisme abdominal

Reçu le 26 octobre 2000 ; accepté le 27 juillet 2001. *Correspondance et tirés à part. Adresse e-mail : [email protected] (P.G. Meyer).

ABSTRACT Percutaneous embolization of a hepatic artery pseudoaneurysm in a multiple trauma child. Hepatic artery pseudoaneurysms are rare complications of blunt abdominal trauma in children. Diagnosis is frequently delayed and made by splanchnic angiography. Most of the indications for surgical treatment have disappeared after the development of selective catheterization and embolization. We report a case in an 8-year-old pedestrian who was struck by a car and suffered a multiple trauma with a severe blunt abdominal trauma. A severe collapse upon admission commanded immediate laparotomy that depicted a liver fracture with associated jejunal and pancreatic lesions. Recovery was progressive until the 15th postoperative day where an abrupt haemobilia occurred. A CT-scan exploration was performed and revealed a vascular mass lesion in the left lobe of the liver. The performance of a selective angiography confirmed the diagnosis of left artery pseudoaneurysm, but because of technical difficulties, no embolization could be performed by this way. A direct percutaneous puncture and embolization of the aneurysm allowed a complete exclusion of the lesion. Eventually, recovery was complete. This percutaneous technique could be a valuable alternative to classical embolization and could avoid surgical treatment that still carries a high morbidity. © 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS blunt abdominal trauma / direct injection / embolization / haemobilia / hepatic artery aneurysm / interventional radiology / pediatrics

Pseudo-anévrysme hépatique

Le pseudo-anévrysme artériel hépatique post-traumatique est une pathologie rare chez les enfants victimes de traumatismes abdominaux sévères [1, 2]. Le diagnostic difficile est souvent retardé par rapport au traumatisme. Ce cas souligne la difficulté diagnostique, décrit les moyens diagnostiques et thérapeutiques indiqués dans cette pathologie et présente une modalité originale de traitement endovasculaire par abord direct transcutané. OBSERVATION Un piéton de huit ans était renversé par une voiture. L’enfant dans le coma (score de Glasgow, GCS : 3) était en collapsus (FC = 100 b·min–1, PA = 60 / 40 mmHg). L’équipe du Smur constatait, outre le traumatisme crânien, un traumatisme abdominal sévère avec un hématome étendu à l’hypocondre gauche, au flanc et à la xiphoïde, ainsi qu’une fracture du fémur droit. La trachée intubée et les poumons ventilés après anesthésie, un remplissage vasculaire rapide à base de macromolécules était réalisé pendant le transport. L’échographie abdominale pratiquée à l’arrivée à l’hôpital retrouvait une contusion hépatique gauche et un hémopéritoine massif, qui associé au collapsus persistant, imposait une laparotomie d’urgence. Celle-ci évacuait un hémopéritoine de 2,5 litres et retrouvait une fracture hépatique à la jonction des lobes gauche et droit, une plaie jéjunale et une fracture de la tête du pancréas. Les gestes chirurgicaux consistaient en une hémostase de la tranche hépatique, une suture directe de la plaie jéjunale et une mise en place de drainages biliaire et péripancréatique. L’état hémodynamique restait précaire durant toute l’intervention. Une transfusion de deux masses sanguines et de fortes doses de dopamine (jusqu’à 50 µg·kg–1·min–1) étaient utilisées. À la fin de la laparotomie, une scanographie cérébrale révélait un hématome extradural gauche isolé avec effet de masse. Il n’existait pas de signes de localisation, et une évacuation était réalisée. Par ailleurs, la fracture de fémur était traitée, dans un premier temps par traction simple. L’évolution clinique et biologique immédiate était progressivement favorable. Le sevrage de dopamine pouvait être réalisé rapidement. Par ailleurs, l’évolution neurologique était simple, avec un réveil complet au sixième jour. Le sevrage ventilatoire était réalisé au dixième jour et la trachée était extubée sans problème. Les bilans hépatiques successifs mon-

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traient une décroissance progressive des transaminases hépatiques (ASAT et ALAT initiales > 500 UI). Le drainage biliaire était laissé en place et la nutrition parentérale totale était poursuivie sur cathéter veineux central. Des contrôles échographiques réguliers permettaient de vérifier la stabilité des lésions hépatiques dans les premiers jours. Une hémorragie importante s’extériorisait par le drain biliaire au 15e jour postopératoire. L’hémoglobine passait en moins de deux heures de 10 g·100 mL–1 à 7,5 g·100 mL–1. Il n’existait pas de ré-ascension des transaminases hépatiques. Après une transfusion de 20 mL·kg–1 de concentrés globulaires, une échographie abdominale retrouvait une zone intrahépatique hypo-échogène dans le lobe gauche. Un contrôle scanographique pratiqué avec injection de produit de contraste, confirmait une masse intrahépatique évoquant un pseudo-anévrysme artériel hépatique. Une angiographie permettait de localiser le vaisseau porteur et de tenter de réaliser un traitement endovasculaire de cette lésion. L’angiographie hépatique sous anesthésie générale confirmait le diagnostic et situait l’anévrysme sur la branche gauche de l’artère hépatique. Il était cependant impossible, malgré de nombreuses tentatives, de réaliser un cathétérisme sélectif de la branche porteuse de l’anévrysme du fait de son petit calibre. Un repérage échographique permettait une ponction percutanée du pseudo-anévrysme, l’injection de produit de contraste confirmait la position intra-anévrysmale de l’extrémité de l’aiguille et retrouvait un réseau d’aval satisfaisant (figure 1), 2 mL de cyanoacrylate mélangé à du lipiodol étaient alors injectés. Le contrôle angiographique montrait l’exclusion complète du pseudo-anévrysme (figure 2). Une stabilité hémodynamique parfaite était obtenue pendant toute la procédure sans nécessité de remplissage vasculaire, le réveil immédiat et les suites étaient simples. Le drain biliaire était retiré au cinquième jour après embolisation ; la reprise du transit puis de l’alimentation entérale s’effectuait sans problèmes. Un contrôle scanographique confirmait l’occlusion complète persistante du pseudo-anévrysme. L’enfant, conscient et sans déficit systématisé, sortait du service au 30e jour pour un court séjour en centre de rééducation spécialisée. Un contrôle angiographique à trois mois confirmait la disparition complète de la lésion et le bilan biologique ne révélait aucune anomalie persistante.

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Figure 1. Contrôle angiographique avant embolisation. Après abord percutané de l’anévrysme (le système est en place, visible en soustraction), contrôle du réseau artériel hépatique par opacification sélective endovasculaire. L’ensemble du réseau artériel hépatique est bien visible, et en particulier le réseau d’aval post-anévrysmal (flèches). L’anévrysme et son réseau de drainage, traités en soustraction, n’apparaissent pas.

Figure 2. Contrôle après embolisation. L’anévrysme complètement embolisé apparaît rempli de contraste, il n’y a pas de fuite extravasculaire. Seul le réseau direct de drainage de la malformation apparaît opacifié et totalement exclu du réseau artériel hépatique. La branche hépatique gauche d’aval visible sur la figure 1 n’est pas concernée par l’embolisation.

DISCUSSION Une vingtaine de cas de pseudo-anévrysme hépatique a été rapportée dans la littérature [1, 2]. Une majorité d’entre eux est décrite chez des patients ayant bénéficié de transplantations hépatiques, d’interventions complexes de chirurgie hépatobiliaire ou de cholécystectomies par voie endoscopi-

que. Seuls neuf cas ont été rapportés chez des patients ayant subi un traumatisme abdominal fermé [1-5]. Dans tous les cas un traumatisme hépatique direct, contusion ou fracture, était noté initialement. Le pseudo-anévrysme hépatique de l’observation présentée a été mis en évidence dans les suites d’un polytraumatisme sévère au décours d’un accident à très forte cinétique. Un traumatisme direct abdominal était responsable d’une fracture hépatique entre foie droit et gauche, nécessitant une laparotomie d’hémostase immédiate avant même l’exploration scanographique du fait du collapsus résistant au remplissage vasculaire massif. Le diagnostic clinique de pseudo-anévrysme hépatique, difficile et souvent retardé, repose sur des signes non spécifiques. Cette complication survient le plus souvent chez des patients à l’état général précaire, après des interventions abdominales lourdes. La persistance ou la reprise de douleurs abdominales, l’apparition ou la réapparition d’un ictère, la survenue d’une hémorragie digestive à type d’hématémèse, d’hémobilie ou d’extériorisation par les drains laissés en place, peuvent relever d’une autre pathologie ou être absents [1-6]. Ils peuvent survenir précocement ou à distance du traumatisme ou de l’intervention chirurgicale, parfois après un délai de plusieurs mois [1, 2]. Les éléments biologiques, également non-spécifiques dans ce contexte, associent ré-ascension des transaminases hépatiques et déglobulisation. L’apparition de ces signes dans un contexte de traumatisme hépatique récent doit faire pratiquer une échographie au lit du malade. Elle retrouve une masse hypo-échogène intrahépatique pour laquelle le Doppler permet d’affirmer le caractère vasculaire et la présence d’un flux de type artériel. Il est raisonnable, en l’absence d’instabilité hémodynamique majeure, de tenter de visualiser de façon précise les rapports vasculaires de la malformation avant de proposer un traitement. La scanographie abdominale avec injection de produit de contraste retrouve une image hypodense, adjacente à l’artère hépatique, prenant le contraste en son centre [1]. L’angiographie, l’examen le plus sensible pour le diagnostic, permet d’établir les rapports précis du pseudo-anévrysme avec le pédicule artériel hépatique. Il faut noter qu’un pseudo-anévrysme confirmé par l’angiographie n’est décelé au scanner abdominal que dans 67 à 68 % des cas, et seulement dans 33 à 50 % des cas à l’échographie Doppler [1].

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Pseudo-anévrysme hépatique

L’angiographie apparaît donc indispensable, après la scanographie et l’échographie Doppler, pour confirmer le diagnostic chaque fois qu’il existe des signes cliniques évocateurs. Elle nécessite toujours, chez l’enfant de moins de 10 ans, une anesthésie générale avec ventilation contrôlée, dont l’induction peut se révéler délicate dans un contexte d’hémorragie digestive active compte-tenu du fréquent isolement des structures de radiologie par rapport aux structures de réanimation. Le traitement endovasculaire classique est proposé dans le même temps que l’artériographie diagnostique. L’injection sélective de cyanoacrylate permet l’exclusion complète et définitive du pseudoanévrysme. Son efficacité est proche de 100 % pour peu que le cathétérisme sélectif de l’artère porteuse soit possible [6]. La morbidité et la mortalité liées à cette technique sont largement inférieures à celles du traitement chirurgical dont les seules indications persistantes sont les échecs du traitement endovasculaire [3, 7]. Des complications spécifiques des embolisations au cyanoacrylate ont cependant été rapportées. Une diffusion systémique du produit entraînant une embolisation digestive aiguë a été décrite après embolisation d’ulcère gastrique [8]. Quelques cas d’embolies pulmonaires ont également été rapportés après embolisation de malformations artério-veineuses cérébrales [9]. L’utilisation de cyanoacrylate dilué plus liquide, celle de retardateur de la polymérisation comme l’acide acétique ou de vecteur comme le glucose, semblent favoriser la survenue de ces complications. L’apparition en cours d’embolisation d’une désaturation, d’un trouble du rythme cardiaque ou d’une douleur thoracique chez un patient sous anesthésie locale, doit faire rechercher une embolisation intra-pulmonaire par une radiographie du thorax et interrompre la procédure. Les complications tardives sont rares. Dans une série de 13 patients embolisés en urgence pour hémobilie, deux abcès intrahépatiques et une nécrose aseptique étaient rapportés [10]. Le cathétérisme hyper-sélectif se heurte chez l’enfant au faible diamètre des artères à cathétériser. L’impossibilité de réaliser un cathétérisme suffisamment sélectif pour permettre l’embolisation dans de bonnes conditions, fait courir le risque de diffusion systémique et de nécrose ischémique secondaire ou l’apparition d’un spasme vasculaire en cours d’embolisation, et doit faire poser l’indication d’un cathété-

risme direct du pseudo-anévrysme. Le repérage échographique perangiographique permet de réaliser cet abord direct percutané de la lésion. Après mise en place d’une aiguille de petit calibre (0,7 mm de diamètre), l’injection directe de produit de contraste permet de vérifier la position intra-anévrysmale de l’extrémité de l’aiguille, le drainage périphérique dans un segment artériel et l’absence de dispersion périphérique précoce. Elle permet également de mesurer la quantité de produit nécessaire à l’occlusion complète de la cavité anévrysmale et d’éviter une surestimation dangereuse. Une injection in situ de cyanoacrylate additionné de lipiodol permet de réaliser l’exclusion complète du pseudo-anévrysme. L’efficacité du traitement est ensuite vérifiée par un contrôle angiographique classique. A notre connaissance, cette technique n’a été rapportée dans la littérature que dans un cas de pseudo-anévrysme post transplantation traité avec succès de cette façon [11]. CONCLUSION Un pseudo-anévrysme artériel hépatique posttraumatique doit être évoqué devant l’apparition retardée de signes évocateurs. L’échographie couplée au Doppler et la scanographie permettent d’approcher le diagnostic. L’angiographie reste l’examen de référence permettant le diagnostic de certitude et le traitement de la lésion. Une embolisation par voie percutanée doit être envisagée, en cas d’échec du cathétérisme sélectif, avant de recourir au traitement chirurgical qui comporte une morbidité importante.

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