\"Le concept du champ à partir du prisme de la littérature\" = original de \"La teoría de los campos s desde el campo de la literatura\", in: Revista del Museo de Antropología 88 (1), 2015, p. 225-232.

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Descripción

Joseph Jurt

La théorie des champs à partir du prisme de la littérature

Le concept du champ s'est révélé être une notion très féconde ; car ce
concept permet de comprendre des faits phénoménologiquement différents
comme structuralement similaires. Ainsi, par exemple, l'antagonisme entre
prophète" et prêtre" a, dans le champ intellectuel, un équivalent
structural qui correspond à l'opposition établie au Moyen Âge entre auctor
et lector.
L'introduction du concept de "champ" dans les études littéraires a permis
de sortir des apories des approches courantes de la littérature. En premier
lieu, la théorie du champ littéraire reprend la dimension systémique de
l'approche structurale" en concevant le champ comme une unité définie par
un ensemble de relations objectives, mais sans évacuer les acteurs – ce qui
n'implique pas pour autant de revenir à la philosophie du sujet' –, et
sans négliger la dimension historique à l'instar des structuralistes purs
et durs. Deuxièmement, par rapport à l'approche de Lucien Goldmann, la
théorie du champ ne conçoit pas les œuvres littéraires comme l'expression
immédiate d'un groupe social, mais prend en compte le processus historique
de l'autonomisation des univers artistiques tout en considérant les
relations et interactions entre les acteurs littéraires comme un phénomène
éminemment social. Enfin, si la théorie du champ littéraire ne réduit pas
la littérature au seul texte, elle ne définit pas le contexte dans un sens
trop large, mais s'en tient à un espace (relativement) autonome, dont la
dimension symbolique est irréductible à l'économisme au sens étroit. La
description des rapports réels entre les acteurs ne suffit pas à définir
cet espace, qu'il faut reconstruire en portant au jour les relations –
invisibles – qui expliquent les stratégies des acteurs.[1]
En réintroduisant les agents Bourdieu réintroduit en même temps l'histoire
évacuée par les structuralistes qui s'en tenaient au seul système
synchronique et à son fonctionnement. Il conçoit l'histoire notamment comme
un processus de différenciation sociale. Dans son livre Méditations
pascaliennes (1997), il retrace d'une manière très détaillée tout le
processus historique de différenciation par lequel les différents champs de
production symbolique se sont autonomisés et constitués. Le premier champ,
qui s'est constitué en Grèce dès le Ve siècle avant notre ère, a été, selon
cette esquisse historique, le champ philosophique qui a pris son autonomie
par rapport au champ politique et religieux; la constitution de ce champ
s'accomplit dans une recherche des règles de la logique inséparable d'une
recherche des règles de la communication et de l'accord intersubjectif".
Dans l'Italie de la Renaissance se réamorce le processus de
différenciation, et les champs scientifique, littéraire et artistique
s'autonomisent par rapport au champ philosophique. Un champ économique ne
se constitue, selon Bourdieu, qu'au terme d'une longue évolution tendant à
dépouiller les rapports de production de leur aspect symbolique en se
concevant comme un univers séparé régi par les lois du calcul, de la
concurrence et de l'exploitation.
Comme celle de structure, la notion de champ suggère d'abord l'image d'un
système synchronique. Le champ" est une construction pour rendre visibles
les luttes de pouvoir et de position de forces co-présents. Le sous-titre
des Règles de l'art – Genèse et structure du champ littéraire – renvoie
cependant à une double dimension, synchronique et diachronique.
L'histoire est présente dans le champ littéraire dans un double sens ; elle
est présente à travers les oeuvres particulières, publiées à un moment
donné; et puis le champ en tant que tel est inséré dans un processus
historique qui est, grosso modo, celui d'une autonomisation progressive.

Champ littéraire et champ politique
Mais pour Bourdieu, les interférences sociales n'agissent pas de manière
immédiate sur les agents du champ; elles sont re-interprétées selon la
logique du champ: Toute influence et toute contrainte exercées par une
instance extérieure au champ intellectuel est toujours réfractée par la
structure du champ intellectuel: c'est ainsi par exemple que le rapport
qu'un intellectuel entretient avec la classe d'origine ou d'appartenance
est médiatisé par la position qu'il occupe dans le champ intellectuel et en
fonction de laquelle il se sent autorisé à revendiquer cette appartenance
(avec le choix qu'elle implique) ou incliné à la répudier et à la
dissimuler honteusement." Ainsi les déterminismes ne deviennent
détermination spécifiquement intellectuelle qu'en se réinterprétant, selon
la logique spécifique du champ intellectuel, dans un projet créateur."[2]
Bourdieu ne nie pas l'existence d'interférences politiques, sociales et
économiques; mais ces interférences sont, selon lui, toujours médiatisées.
Dans l'étude parue dans la revue Scolies, il souligne que le champ
intellectuel est inséré dans un type spécifique de champ politique: Le
champ intellectuel, si grand que puisse être son autonomie, est déterminé
dans sa structure et sa fonction par la position qu'il occupe à l'intérieur
du champ du pouvoir."[3] Bourdieu devra plus tard spécifier cette position
du champ intellectuel par rapport au champ de pouvoir. Les champs de
production culturelle occupent une position dominée dans le champ du
pouvoir, en d'autres termes: les artistes et les écrivains constituent une
fraction dominée de la classe dominante. Les écrivains et les artistes sont
dominants parce qu'ils détiennent un capital culturel qui leur confère un
pouvoir et des privilèges. Mais dans leurs rapports avec les détenteurs de
pouvoir politique et économique, ils sont dominés. Ce n'est plus
aujourd'hui une domination personnelle comme c'était le cas à l'époque du
mécénat, mais c'est une domination structurale exercée par des mécanismes
généraux comme ceux du marché. Cette position de dominants dominés
explique, selon Bourdieu, l'ambiguïté des prises de position des
intellectuels: En révolte contre ceux qu'ils appellent les 'bourgeois',
ils sont solidaires de l'ordre bourgeois, comme on le voit dans toutes les
périodes de crise où leur capital spécifique et leur position dans l'ordre
social sont véritablement menacés."[4] Le champ intellectuel se définit par
son degré d'autonomie par rapport au champ de pouvoir. La légitimité
interne, l'économie interne se trouve dans une relation chiastique par
rapport aux principes fondamentaux du champ de pouvoir économique et
politique. Les types de capitaux dominants dans ces champs n'ont pas la
même valeur à l'intérieur du champ littéraire. La prédominance du capital
économique et du pouvoir économique constitue au sein du champ littéraire
un principe hétéronome auquel obéit une littérature de masse qui a, pour
cette raison, une valeur symbolique moins élevée. Le degré d'autonomie par
rapport aux instances externes est historiquement variable.
Le champ est lui-même le lieu d'une lutte permanente entre les deux
principes de hiérarchisation, le principe hétéronome, qui inspire ceux qui
tâchent de dominer le champ économiquement et politiquement, et le principe
autonome ( l'art pour l'art') qui se caractérise par son indépendance face
à l'économie. Ce qui est décisif, c'est la reconnaissance par les pairs'
et non pas la conformité face aux attentes externes d'un mécène ou du
marché. Même dans le domaine de la littérature de masse, la qualité sociale
(bourgeoise ou populaire) du public n'est pas sans importance. Autonomie et
hétéronomie sont ainsi les critères de différenciation décisifs à
l'intérieur du champ littéraire.[5]
Bourdieu est parti dans sa reconstruction du champ littéraire français du
cas français. A ses yeux, le champ français a atteint le maximum
d'autonomie à la fin du XIXe siècle. C'est à cette époque que se situe
l'intervention de Zola par son J'accuse'. A ses yeux, Zola réussit, à
l'occasion de l'Affaire Dreyfus, à importer dans le champ politique un
problème construit selon les principes de division caractéristique du champ
intellectuel et à imposer à l'univers social les lois du champ
intellectuel, qui a pour particularité de se réclamer de l'universel.
L'autonomie du champ intellectuel était ainsi, selon Bourdieu, la condition
de l'intervention de Zola dans le champ politique au nom des normes propres
du champ littéraire: Le J'accuse est l'aboutissement et l'accomplissement
du processus collectif d'émancipation qui s'est progressivement accompli
dans le champ de production culturelle: en tant que rupture prophétique
avec l'ordre établi, il réaffirme, contre toutes les raisons d'Etat,
l'irréductibilité des valeurs de vérité et de justice, et, du même coup,
l'indépendance des gardiens de ces valeurs par rapport aux normes de la
politique (celles du patriotisme, par exemple), et aux contraintes de la
vie économique".[6]
L'engagement de Zola est, aux yeux de Bourdieu, non seulement un effet de
l'autonomisation du champ, mais également l'aboutissement d'un processus
parallèle, à savoir l'hostilité des écrivains, notamment à partir de 1848,
à l'égard de ceux qui entendaient introduire des enjeux politiques dans le
champ littéraire, ainsi les tenants de l'art social. En s'appuyant sur
l'autorité conquise par les écrivains purs contre la politique, Zola pourra
rompre avec l'indifférentisme politique des devanciers pour intervenir dans
le champ politique au nom de valeurs non-politiques.[7]
Anna Boschetti a cependant souligné que nulle part le champ littéraire
avait atteint une telle autonomie comme en France.[8] On ne saurait donc
universaliser le cas français. On peut saisir l'autonomie sous un double
aspect, sous l'aspect institutionnel (l'existence d'instances de
consécration, d'Académies, de revues, de maisons d'édition), et sous
l'aspect des contenus et des normes littéraires. On peut ainsi imaginer tel
ou tel pays qui dispose d'institutions littéraires spécifiques tout en
suivant les normes d'un centre extérieur.
Paul Aron a pour cette raison proposé à juste titre de distinguer entre
autonomie et indépendance. Cette distinction permet de saisir les rapports
complexes entre champ littéraire et champ politique, entre littérature et
nation. Si la littérature française, se réclamant dès la Renaissance de la
filiation gréco-romaine a prétendu à une certaine universalité, les jeunes
nations s'en sont émancipées, lors du procès du 'nation-building' à la fin
du XVIIIe siècle de ce modèle en constituant une littérature nationale,
moins autonome, mais plus indépendante par rapport au modèle français.
Dans des régions appartenant à la périphérie, des écrivains ont ainsi pu
participer à la lutte politique pour une indépendance ce qui peut paraître
une option hétéronome, mais qui était indispensable pour créer les
conditions de possibilité pour un champ littéraire (relativement) autonome.
Mais il y avait aussi un autre cas de figure : tel ou tel pays pouvait
s'enorgueillir de ses écrivains reconnus indépendamment des contenus de
leurs œuvres et considérer ainsi la littérature comme partie importante du
patrimoine national. Le champ littéraire ne se définit cependant pas d'une
manière exclusive par rapport au champ littéraire national. A l'intérieur
d'un champ littéraire national peuvent exister des sous-champs littéraires,
régionaux qui s'opposent ou s'intègrent à ou dans la littérature nationale.
Le champ littéraire national fait, d'autre part, partie d'ensembles
englobant telle une aire linguistique comme la francophonie ou
l'hispanophonie et s'insère en fin de compte, à une littérature mondiale,
concept entrevu par Goethe en 1827 et systématisé par l'analyse bien connue
de Pascale Casanova.[9]
Vu la multiplicité des rapports entre champs littéraire et champ politique,
on ne saurait s'en tenir à la catégorie de la 'littérature nationale' comme
instrument heuristique exclusif et, il faudrait, en plus, nuancer la
relation autonomie/ hétéronomie en tenant compte des positions centrales ou
périphériques à l'intérieur d'une structure globale.

Champ littéraire et champ scientifique
La distance entre champ littéraire et champ scientifique est moins grande
que celle entre les champs littéraire et politique. La littérature et la
science se situent en quelque sorte au même niveau, toutes les deux visant
à la production d'un savoir, mais par des modes différents. Si au XVIIIe
siècle, les deux dimensions – qu'on pense à Goethe, ou à Buffon – faisaient
partie d'un même champ, les deux champs se sont différenciés au début du
XIXe siècle notamment à travers un processus de professionalisation et
d'institutionalisation des sciences (comme disciplines universitaires). Les
deux champs en train de s'autonomiser ont pu ainsi entrer en concurrence ;
Louis de Bonald a ainsi parlé dès 1807 de la guerre des sciences et des
lettres". Les sciences jouissaient désormais d'un prestige si élevé que des
courants littéraires, notamment d'inspiration anti-romantique espéraient
pouvoir se renouveler en se réclamant du modèle et des méthodes des
sciences.[10]
Si Balzac s'est réclamé en ce qui concerne son approche systématique de
l'histoire naturelle, il entrait, en transposant cette approche dans le
domaine de la société, en concurrence avec cette nouvelle science qui était
en train de se constituer à savoir la sociologie. Mais la sociologie comme
troisième culture" a été tiraillée, comme l'a bien montré Wolf Lepenies,
entre une orientation scientifique et une orientation littéraire.[11]
Flaubert, à son tour, s'est tôt référé au paradigme scientifique, à cause
de sa précision, comme modèle stylistique. Mais il se sert aussi des
méthodes des sciences de l'histoire lors de la préparation de ses romans.
En traitant des sujets historiques, il entre en concurrence avec les
historiens très dominants de son époque. Il leur reproche, implicitement,
de ne pas être assez 'scientifiques', en s'inspirant d'une philosophie de
l'histoire téléologique. A travers ses romans historiques, notamment
L'Education sentimentale, Flaubert entend montrer qu'il n'y a pas une
histoire, mais des discours, parfois contradictoires, sur l'histoire. Son
pessimisme le conduit à poser des forces équivalentes, mais opposées qui se
neutralisent sans laisser apercevoir un dépassement ou une finalité
quelconque.[12]
Mais l'histoire est elle-même proche de la littérature comme l'a bien
démontré Paul Ricoeur qui relève des éléments fictionnels dans
l'historiographie. Déjà le schéma du récit (linéaire) est projeté sur le
temps de l'univers. La vision tragique, comique, romanesque ou ironique
conférerait à un ouvrage historique sa permanence. Les procédés de la re-
présentation seraient les mêmes en littérature et en histoire. L'évocation
de la Révolution française par Michelet pourrait passer d'une œuvre
littéraire comparable à Guerre et Paix de Tolstoï dans lequel le mouvement
passerait de la fiction ver l'histoire et chez Michelet dans un sens
inverse. Pour l'instance narrative du roman, les faits narrés ont la même
évidence qu'ont les faits historiques pour l'historien.[13]
Mais l'histoire a répliqué à Flaubert notamment lors du fameux débat entre
Flaubert et l'archéologue Froehner au sujet du roman Salammbô. A travers
cette polémique, on peut très bien lire la rivalité des deux champs.
Froehner définit ainsi le 'terrain' de l'archéologie à laquelle incombe la
reconstruction du passé alors qu'il attribue au romancier le 'terrain' du
présent qu'il faudrait évoquer avec une finalité moralisatrice. Les
romanciers pourraient seulement intervenir lorsque l'archéologie aurait
déjà fait son travail. Flaubert récuse ce partage des tâches, ce qu'il
vise, ce n'est pas une vue 'objective' du passé, mais – selon sa conception
d'un réalisme subjectif – les vues qu'on a eues sur la réalité. Flaubert ne
veut pas, en fin de compte que ses œuvres doivent l'éclat à leurs sujets,
fussent-ils historiques, mais seulement à leur perfection esthétique. Il
utilise le savoir historique comme un tremplin ; dans et par le travail de
l'écriture il vise en dernier lieu la cohérence et la perfection
esthétique.
Zola ne partagea pas cette finalité. Ses romans se fondent aussi sur des
recherches historiques minutieuses, mais également sur ce qu'on appellerait
aujourd'hui des enquêtes sociologiques. L'auteur de L'Assommoir ne
concevait pas ses œuvres comme des fictions, mais comme des études, une
littérature déterminée par la science". Il revendiquait pour la littérature
naturaliste un caractère scientifique parce qu'elle se fondait sur les
résultats élaborés par les sciences modernes, mais aussi à cause de sa
méthode. Sa conception du roman expérimental a été en effet une
transposition de la méthode développée par Claude Bernard dans son
Introduction à l'étude de la médecine expérimentale sur la littérature. Le
procédé expérimental de la physique et de la chimie serait non seulement
transposable lors de l'étude d'organismes vivants, mais également pour
l'analyse de la vie émotionnelle et intellectuelle des hommes. Ce n'est là
qu'une question de degré dans la même voie, de la chimie à la physiologie,
puis de la physiologie à l'anthropologie et à la sociologie. Le Roman
expérimental est au bout."[14] Zola concevait en théorie l'élaboration d'un
roman selon le procédé scientifique classique : observation et formulation
d'une hypothèse – expérience – vérification ou falsification de l'hypothèse
initiale.
On a pu objecter que le projet scientifique était dans les romans en effet
subverti par le système de concepts, d'images, d'associations dont se
nourrissent la langue, l'imagination et les obsessions de Zola. Toujours
est-il que la référence aux sciences était devenue dans le champ littéraire
une nouvelle forme de légitimation. Le savant était devenu un point de
cristallisation d'un affrontement entre deux écoles qui revendiqueraient la
légitimité à l'intérieur du champ littéraire. Un courant naturaliste
scientiste et un courant anti-scientiste, celui du 'roman psychologique'.
Le savant était devenu pour la société, notamment à travers la figure de
Pasteur, une figure exemplaire du progrès. Lors de son plaidoyer pour
Dreyfus dans son célèbre 'J'accuse', Zola invoque de nouveau toute la
science humaine au travail pour l'œuvre prochaine de vérité et de
justice"[15] contre l'obscurantisme antisémite et le militarisme
autoritaire. Ce n'est pas un hasard si à la suite de cette intervention des
scientifiques et des littéraires se sont unis pour demander à travers la
fameuse pétition la révision du procès Dreyfus. Le recours à la science
jouait un rôle non négligeable pour la motivation des dreyfusards.[16]
Les rapports entre champ littéraire et champ scientifique n'ont pas cessé
au cours du XXe siècle, en ce qui concerne l'historiographie, mais aussi la
sociologie et d'autres disciplines. On pourrait dans ce contexte mentionner
Paul Nizan qui dans ses romans néo-naturalistes des années 1930 s'est
référé aux analyses du sociologue Maurice Halbwachs qui s'était consacré à
l'étude des différences existant entre les styles de vie du prolétariat, de
la petite-bourgeoisie et de la bourgeoisie. Nizan s'est également référé à
Marcel Mauss qui spécifia la catégorie de la conscience collective en tant
que 'fait social total' à travers ses effets sur l'individu, tout en
développant l'idée d'une complémentarité entre sociologie et
psychologie.[17]
Le sujet de l'ascension sociale et de ses conséquences est également au
centre des œuvres d'Annie Ernaux. On a ainsi pu relever dans ses œuvres
littéraires un travail sociologique rendant compte et raison des pratiques
d'agents des classes populaires, ne relevant ni d'une nostalgie ambiguë ni
d'un populisme militant. On a établi un parallèle entre ses œuvres
littéraires d'origine autobiographique et les analyses de Bourdieu qui a
ajouté à la notion d'exploitation celle de la domination symbolique
s'exerçant non seulement sur le lieu du travail, mais dans tous les
domaines de la vie quotidienne. A travers les livres d'Annie Ernaux, on
peut ainsi saisir des traits essentiels du style de vie de sa couche
sociale d'origine, de la situation historique des gens dominés de la
province française.
Chez Bourdieu, la sociologie se rapproche, en revanche de la littérature.
On trouve dans l'analyse des Règles de l'art une réflexion approfondie sur
la fonction cognitive de l'œuvre d'art, à propos de Flaubert notamment. Ce
travail de la forme permet une anamnèse au moins partielle des structures
sociales refoulées. Selon Pierre Bourdieu, l'œuvre littéraire permet sa
singularité qui vise un au-delà de cette singularité, de condenser des
faits qu'une analyse scientifique doit développer lentement : Il n'est pas
de meilleur attestation de tout ce qui sépare l'écriture littéraire de
l'écriture scientifique que cette capacité, qu'elle possède en propre, de
concentrer et de condenser dans sa singularité concrète d'une figure
sensible et d'une aventure individuelle, fonctionnant à la fois comme
métaphore et comme métonymie, toute la complexité d'une structure et d'une
histoire que l'analyse scientifique doit déplier et déployer
laborieusement."[18]
Dans Réponses, Bourdieu compare le travail du sociologue et celui de
l'écrivain. La phrase de Flaubert Je voudrais vivre toutes les vies"
correspond selon lui à l'intention du sociologue de vouloir comprendre
autant d'expériences humaines que possibles. A l'instar de l'écrivain, le
sociologue a à formuler le non-formulé. C'est par là que le travail du
sociologue s'apparente au travail de l'écrivain (je pense par exemple à
Proust): comme lui, nous avons à faire accéder à l'explication des
expériences, générique ou spécifiques, qui, à l'ordinaire passent
inaperçues ou restent informulés"[19].
Ces propos démontrent combien Bourdieu a pris au sérieux la littérature;
ses détracteurs ont eu tort de lui reprocher, à la suite de la publication
de La Distinction, de ne considérer l'art et la littérature que sous
l'angle de la consommation comme des instruments de distinction sociale.
Bourdieu a été sensible, dès sa première analyse de L'Education
sentimentale jusqu'aux cinq cents pages des Règles de l'art en 1992, à la
fonction cognitive d'une littérature du rang de celle de Flaubert, de
Virginia Woolf, de Claude Simon. Donc d'une littérature qui est le produit
d'un travail et d'une recherche de l'expression juste extrêmement intenses
et sérieux égal à celui d'une sociologie qui mérite son nom.

Champ littéraire et champ artistique
Les rapports entre champ littéraire et champ scientifique ont joué un rôle
important depuis la différenciation entre les deux champs dès le début du
XIXe siècle. Les relations entre le champ littéraire et le champ artistique
ont en revanche suscité un débat intense dès la Renaissance.
Si la peinture était à cause de sa pratique manuelle exclue du système des
Sept Arts Libéraux, depuis le Quattrocento, les peintres luttaient pour la
promotion de leur art, notamment par la constitution d'une institution
spécifique qui pouvait fonctionner comme une instance de légitimation qui
se séparait d'une conception artisanale de l'art: l'Académie.[20] On
mettait en relief la dimension intellectuelle de la peinture qui
présupposerait un savoir dans le domaine de l'histoire et de la poésie et
une compétence mathématique et géométrique. Avec la réception d'Euclide à
l'époque du Moyen Age tardif et avec la perspective centrale déduite
d'Euclide on entendait souligner que la peinture était un art proche des
sciences mathématiques. Les peintres eux-mêmes contribuèrent à la promotion
des arts visuels par une réflexion théorique intense et par la
visualisation emblématique de cette théorie. Les deux arts se
différencieraient uniquement par les moyens respectifs, non pas par leur
objet. Les termes pictura loquens pour la poésie et muta poesis pour la
peinture mettaient en relief la convertibilité des deux arts (sister-arts).
Les catégories de la rhétorique (inventio, dispositio) sont également
appliquées à la peinture à laquelle on attribue même une fonction
narrative. Lors des discussions au sein de l'Académie Royale de Peinture et
de Sculpture on se réfère souvent à des critères d'une poétique de l'art
théâtral (péripétie, unité de l'action).[21]
Au cours du XVIIIe siècle, on commence à mettre en question la
convertibilité totale des formes picturales et littéraires de la
représentation afin de réfléchir sur la spécificité de chaque medium; un
des premiers a été l'Abbé Du Bos dans ses Réflexions critiques sur la
Poésie et la Peinture (1719).[22] Du Bos distingue ici entre les signes
naturels" de la peinture et les signes artificiels" de la poésie; l'effet
exercé par poésie sur notre âme sensitive sera à ses yeux plus grande.
Tzvetan Todorov pense que Du Bos a esquissé à travers la distinction entre
signes naturels et artificiels une première typologie sémiotique des
arts.[23]
L'écrit qui a radicalement mis en question la convertibilité des deux arts
a été cependant Laokoon ou les frontières de la peinture et de la poésie
de Lessing de 1776. Lui avait souligné les différences de principe entre
littérature et peinture; la littérature est pour lui un art du temps se
servant de signes conventionnels et la peinture un art de l'espace
s'exprimant par des signes 'naturels'.
Toujours est-il que cette idée de la spécificité des deux arts s'impose de
plus en plus au cours du XIXe siècle. Ceci ne signifie nullement une
absence de rapports entre les deux arts. Littérature et peinture seront
désormais plus rivales que sœurs. Dans la domaine de la littérature la
peinture ne cesse pas d'être présente. Mais le champ artistique était au
XIXe siècle moins autonome que le champ littéraire. Car en France, ce
furent les écrivains qui exerçaient des fonctions comme instances de
consécration et de sélection dans le champ artistique.
On relève en effet en France une tradition remarquable de la critique
littéraire allant de Diderot à Valéry décrite par Anita Brookner dans son
ouvrage The Genius of the Future. Si les littérateurs se reconnaissent le
droit – et si on leur reconnaît ce droit – de parler de manière autorisée
des Beaux-Arts, ceci indique aussi un certain manque d'autonomie du champ
artistique dépendant du discours légitime et légitimant produit par les
agents provenant du champ littéraire. Il y a donc une sorte de compétition
entre littérature et arts visuels aussi dans le domaine du discours sur
l'art monopolisé très longtemps par les écrivains.
A la fin du XIXe siècle, le champ artistique affirmera une opposition de
nature entre littérature et peinture au nom de la peinture pure, reprochant
aux critiques d'art littéraires d'avoir méconnu la spécificité de l'Art. En
secouant la tutelle de la critique d'art faite par des littéraires en même
temps que la tutelle de l'Etat qui cessera d'organiser le salon artistique
annuel, le champ artistique essaiera de conquérir son autonomie totale. Les
rapports entre peinture et littérature ne cesseront pas de susciter
l'intérêt de la critique universitaire, notamment à travers le nouveau
paradigme de l'intermédialité.[24]

Champ de production et champ de réception
Les champs littéraire, scientifique et artistique sont observés surtout du
côté des producteurs. Et l'approche de Bourdieu vise en effet en premier
lieu la genèse des œuvres à partir de la position des auteurs dans leurs
champs respectifs. La dimension de la réception n'est pas prépondérante,
mais elle n'est pas absente, notamment à travers les instances de
consécration.
On n'oubliera pas que la valeur symbolique des produits culturels – œuvres
littéraires ou artistiques – n'existe pas en tant que telle; les objets
matériels produits par l'artiste ou par l'écrivain ne deviennent réellement
des œuvres d'art et de littérature que lorsqu'ils ont été reconnus comme
tels par des instances de sélection et de consécration compétentes.[25]
Dans la logique du champ il faut donc, pour reprendre les termes de Pierre
Bourdieu, considérer comme contribuant à la production non seulement les
producteurs directs de l'œuvre dans sa matérialité (artiste, écrivain,
etc.) mais aussi les producteurs du sens et de la valeur de l'œuvre,
critiques, éditeurs, directeurs de galeries, membres des instances de
consécration, académies, salons, jurys, etc. et tout l'ensemble des agents
qui concourent à la production de consommateurs aptes à connaître et à
reconnaître l'œuvre d'art comme telle, c'est-à-dire comme valeur
[...]".[26]
Dans les Règles de l'art, Bourdieu est revenu à son étude de 1977 sur la
production de la croyance" et il y analyse également un phénomène de
réception, à savoir les réactions des critiques de théâtre. Il y pose la
thèse d'une homologie structurale et fonctionnelle entre l'espace des
auteurs et l'espace des consommateurs (et des critiques) ainsi qu'une
correspondance entre la structure sociale des espaces de production et les
structures mentales qu'auteurs, critiques et consommateurs appliquent aux
produits (eux-même organisés selon ces structures)"[27] Il ne s'agirait
cependant pas d'un ajustement délibéré de l'offre à la demande qui
expliquerait l'harmonie entre les producteurs et les consommateurs de
produits culturels: Ainsi les critiques ne servent si bien leur public que
parce que l'homologie entre leur position dans le champ intellectuel et la
position de leur public dans le champ du pouvoir est le fondement d'une
connivence objective (fondée sur les mêmes principes que celle qu'exige le
théâtre) qui fait qu'ils ne défendent jamais aussi sincèrement, donc aussi
efficacement, les intérêts de leur clientèle que lorsqu'ils défendent leurs
intérêts propres contre leurs adversaires, les critiques occupant des
positions opposées aux leurs dans le champ de production".[28]
Si Bourdieu situe les critiques d'abord dans l'espace des consommateurs et
ensuite dans celui de la production, ceci s'explique par le fait que le
critique appartient à un double cycle de communication; il est récepteur à
l'intérieur d'un cycle de communication primaire (auteur-critique) et en
même temps émetteur à l'intérieur d'un cycle de communication primaire
(auteur-critique) et en même temps émetteur à l'intérieur d'un cycle de
communication secondaire (critique-public).[29] La thèse d'une anticipation
(inconsciente) des réactions du public par les critiques me semble
intéressante. On peut quand même se demander si la thèse de l'homologie
entre champ de production et champ de consommation"[30] peut passer comme
la règle et s'il ne faut pas se demander s'il n'y a pas des interférences
autonomes qui interviennent dans le champ de réception.
L'analyse (brève) des réactions des critiques de théâtre concernait un
espace homogène (la critique théâtrale parisienne). Dans sa conférence
programmatique sur Les conditions sociales de la circulation
internationale des idées" de 1989, Bourdieu s'est consacré à la réception
transnationale d'œuvres scientifiques et littéraires étrangères. Il
constate que les textes circulent souvent sans leur contexte. Les
récepteurs, insérés dans un champ de production différent, les
réinterprètent en fonction de la structure du champ de réception. Le sens
et la fonction d'une oeuvre étrangère seraient ainsi déterminés au moins
autant par le champ d'accueil que par le champ d'origine. D'une part, la
fonction dans le champ d'origine serait souvent ignorée, d'autre part, le
transfert d'un espace à l'autre se ferait à travers toute une série
d'opérations sociales, i.e. une opération de sélection, une opération de
marquage et une opération de lecture, les lecteurs appliquant
essentiellement à l'œuvre des catégories de perception et des
problématiques de leur propre champ. […] Les effets structuraux […] à la
faveur de l'ignorance, rendent possibles toutes les transformations et les
déformations créées à des usages stratégiques des textes et des auteurs,
peuvent s'exercer en dehors de toute intervention manipulatrice. Les
différences sont si grandes entre les traditions historiques […] que
l'application à un produit culturel étranger des catégories de perception
et d'appréciation acquises à travers l'expérience d'un champ national peut
créer des oppositions fictives entre des choses semblables et de fausses
ressemblances entre des choses différentes."[31]
Que la réception d'un auteur étranger soit conditionnée en premier lieu par
le champ d'accueil se confirme par l'analyse de l'accueil de Zola en
Allemagne. La conception d'une littérature basée sur les sciences y a été
fortement critiquée parce qu'elle ne correspondait pas aux traditions du
champ allemand.
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Bâle, le 17 juin 2011
Joseph Jurt

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[1] Voir Joseph Jurt, El aporte de la teoría del campo a los estudios
literarios", in: Louis Pinto, Gisèle Sapiro, Patrick Champagne (dir.),
Pierre Bourdieu, sociólogo. Buenos Aires, Nueva Visión, 2007, p. 182-199.
Voir aussi Patrick Champagne, Quelques remarques à propos du concept du
champ chez Pierre Bourdieu", in: Clément Bastien, Simon Borja, David Naegel
(dir.), Le raisonnement sociologique à l'ouvrage. Théorie et pratiques
autour de Christian de Montlibert. Paris, Harmattan, 2010, p. 65-74
[2] Pierre Bourdieu, Champ intellectuel et projet créateur", Les Temps
Modernes, 246, nov. 1966, p. 905.
[3] Ibidem, p. 905.
[4] Pierre Bourdieu, Champ du pouvoir, champ intellectuel et habitus de
classe", Scolies, 1, 1977, p. 15.
[5] Voir à ce sujet Joseph Jurt, Autonomía et heteronomía: el camp
literario en Francia y en Alemania", Revista VIS-Humanidades [Bucaramango],
Vol. 27, No, julio-diciembre 1998, p. 113-127.
[6] Pierre Bourdieu, Les Règles de l'art. Paris, Seuil, 1992, p. 186.
[7] Voir Joseph Jurt, Pierre Bourdieu: universalité, éthico-politique et
compétence scientifique", in: Ursula Bähler (ed.), Ethique de la
philologie. Berlin, BWV, 2006, p. 41-47.
[8] Anna Boschetti, La teoria del campo letterario di Pierre Bourdieu",
in: P. Carile e A.M. Mandich (ed.), Discorrere il metodo. Il contributo
della Francesistica agli studi metodologici. Ferrara, Centro Stampa
Università, 1995, p. 136-137.
[9] Pascale Casanova, La République mondiale des lettres. Paris, Seuil,
1999.
[10] Voir Joseph Jurt, La science comme modèle: Balzac, Flaubert, Zola",
in: Thorsten Greiner, Hermann H. Wetzel (ed.), Die Erfindung des
Unbekannten. Wissen und Imagination bei Rimbaud. L'invention de l'inconnu.
Science et imagination chez Rimbaud. Würzburg, Königshausen & Neumann,
2007, p. 39-48.
[11] Wolf Lepenies, Les Trois Cultures. Entre science et littérature:
l'achèvement de la sociologie. Paris, Editions de la MSH, 1990.
[12] Voir Gisèle Séginger, Flaubert. Une poétique de l'histoire. Presses
universitaires de Strasbourg, 2000 et Joseph Jurt, Flaubert et le savoir
historique", in: Eveline Pinto (ed.), L'écrivain, le savant et le
philosophe. La littérature entre philosophie et sciences sociales. Paris,
Publications de la Sorbonne, 2003, p. 45-62.
[13] Paul Ricoeur, Temps et récit. t. 3. Le temps raconté. Paris, Seuil,
1991, p. 331-348.
[14] Emile Zola, Le roman expérimental. Paris, 1971, p. 60.
[15] Emile Zola, L'Affaire Dreyfus. La vérité en marche. Paris. Garnier-
Flammarion, 1969, p. 122.
[16] Emile Durkheim, L'individualisme et les intellectuels", Revue bleue
(2juillet 1998), p. 7-13 et Louis Pinto, La vocation de l'universel. La
formation de la représentation de l'intellectuel vers 1900", Actes de la
recherche en sciences sociales, 55 (novembre 1984), p. 23-32 et Joseph
Jurt, L'engagement de Zola pour Dreyfus et la logique du champ
littéraire", in: Auguste Dezalay (ed.), Zola sans frontières. Presses
universitaires de Strasbourg, 1996, p. 33-46.
[17] Voir Joseph Jurt, Littérature et sociologie – Sociologie et
littérature (de Balzac à Bourdieu)", in: Clément Bastien, Simon Borja,
David Naegel (dir.), Le raisonnement sociologique à l'ouvrage . Théorie et
pratiques autour de Christian de Montlibert. Paris, L'Harmattan, 2010, p.
409-428.
[18] Pierre Bourdieu, Les Règles de l'art. Genèse et structure du champ
littéraire. Paris, Seuil, 1992, p. 43.
[19] Pierre Bourdieu (avec Loïc Wacquant), Réponses, Pour une anthropologie
réflexive. Paris, Seuil, 1992, p. 178.
[20] Voir Joseph Jurt, La peinture et le paradigme littéraire au XVIIè
siècle", in: Papers on French Seventeenth Century Literature, vol. XIV, n°
26, 1987, p. 69-81.
[21] Voir Joseph Jurt, Die Debatte um die Zeitlichkeit in der Académie
Royale de la Peinture am Beispiel von Poussins Mannalese", in: Franziska
Sick, Christof Schöch (ed.), Zeitlichkeit in Text und Bild, Heidelberg,
Winter 2007, p. 337-347.
[22] Voir Joseph Jurt, L'abbé du Bos et la spécificité des arts", in:
Recherches et Travaux, n° 52, 1997, p. 49-65.
[23] Tzvetan Todorov, Théories du symbole. Paris, Seuil, 1989, p. 162.
[24] voir Joseph Jurt, Frühgeschichte der Intermedialität: Flaubert", in:
Ute Degner, Norbert Christian Wolf (eds.), Der neue Wettstreit der Künste.
Legitimation und Dominanz der Intermedialität. Bielefeld, transcript, 2010,
p. 19-40; version française électronique L'intermédialité chez Flaubert",
site Flaubert janvier 2011, http://flaubert.univ-
rouen.fr/article.php?id=14, voir aussi Joseph Jurt, « Flaubert e as artes
visuais », Alea. Estudos neolatinos [Rio de Janeiro], vol. 4, n° 1,
janeiro/junho 2002, p. 33-54.
[25] Pierre Bourdieu, La Production de la croyance. Contribution à une
économie des biens symboliques", Actes de la recherche en sciences
sociales, n°13, févr. 1977, p. 5.
[26] Pierre Bourdieu, Le champ littéraire: préalables critiques et
principes de méthode", Lendemains, n° 36, déc. 1984, p. 9.
[27] Pierre Bourdieu, Les règles de l'art, p. 230-231.
[28] Ibidem, p. 231.
[29] Voir Joseph Jurt, La réception de la littérature par la critique
journalistique. Paris, J.-M. Place, 1980, p. 36-37 ; Joseph Jurt, « Por
una sociología se la Recepción », Journal of Interdisciplinary
Literature Studies/ Quadernos interdisciplinarios de Estudios
Literarios, vol. 2, n° 2, 1990, p. 215-236 ; Joseph Jurt, A descoberta
do leitor. Da estética da recepção à sociologia da recepção », in :
Mello, Celina Maria M de ; Catharina, Pedro Paulo G. F. ; Reis, Sonia
Cristina (ed.), A palavra, o artista e a leitura – Homenagem a
Théophile Gautier. Rio de Janeiro, Confraria do Vento, 2014, p. 29-47.


[30] Bourdieu, Les règles de l'art, p. 234.
[31] Pierre Bourdieu, Les conditions sociales de la circulation
internationale des idées", in: RZLG, n° 14, 1990, p. 5-6.
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