La tuberculose hypophysaire : à propos d’un cas

September 17, 2017 | Autor: Muhammad Abid | Categoría: Public Health, Clinical Sciences
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Descripción

Ann. Endocrinol., 2005 ; 66, 4 : 340-346 © Masson, Paris, 2005

ARTICLE ORIGINAL

La tuberculose hypophysaire : à propos d’un cas L. Trabelsi (1), N. Majdoub-Rekik (1), H. Bouaziz (1), M. Mnif-Feki (1), B. Hammemi (2), I. Maaloul (2), M. Ben Jmaa (2), M. Abid (1) (1) Service d’Endocrinologie, CHU Hédi Chaker, Sfax, Tunisie. (2) Service des maladies infectieuses CHU Hédi Chaker, Sfax, Tunisie.

Tirés à part : L. Trabelsi, à l’adresse ci-dessus.

Pituitary tuberculosis: a case report L. Trabelsi, N. Majdoub-Rekik, H. Bouaziz, M. Mnif-Feki, B. Hammemi, I. Maaloul, M. Ben Jmaa, M. Abid Ann. Endocrinol., 2005 ; 66, 4 : 340-346

340

Through a case of sellar and suprasellar tuberculoma which presented with central diabetes insipidus, the authors report the frequency of pituitary tuberculoma, its physiopathology, clinical presentation hormonal and radiological findings thus management and evolution. A 42 years old woman, with a history of erythema nodosum, presented with polyuria polydipsia (PUPD), amenorrhea and galactorrhea. Endocrine investigations showed central diabetes insipidus, elevated serum prolactin levels and cortisol failure. Magnetic resonance imagining scans (MRI) revealed a nodular thickening of the pituitary enlargement and loss of posterior pituitary hypointensity signal. Etiologic inquiry has removed the diagnosis of sarcoidosis, Langerhan’s histosis, autoimmune hypophysitis and sellar metastasis. The history of erythema nodosum, the positivity of tuberculin skin test and the presence of koch bacillus in the bronchial fluid after culture led to a diagnosis of tuberculosis. Treatment was started with four drug antitubercular chemotherapy regimen for 2 months, and tow drug antitubercular chemotherapy regimen for 16 months. This treatment is associated with hydrocortisone, desmopressin nasal spray and bromocriptine. Under treatment, there was an improvement in clinical condition, disapearence of headache, PUPD and galactorrhea thus normalization of prolactin. A follow-up MRI, 8 months later, showed that pituitary lesion has been completely removed, suggesting our clinical and biology presumption. Pituitary tuberculosis is rare, however, when encountered, they may present a diagnostic difficulty. Accurate diagnosis and management is important because pituitary tuberculoma is curable. Key words: Sellar tuberculoma, central diabetes insipidus, thick pituitary stalk, antitubercular chemotherapy. La tuberculose hypophysaire : à propos d’un cas À travers une observation de tuberculose sellaire et suprasellaire révélée par un diabète insipide central, les auteurs rappellent la rareté de la tuberculose de cette région, sa physiopathologie, son expression clinique, hormonale et radiologique ainsi que son traitement et son évolution. Il s’agit d’une femme âgée de 42 ans, hospitalisée pour un syndrome polyuropolydipsique d’installation brutale associé à une aménorrhée secondaire et à une galactorrhée. Les explorations hormonales ont conclu à un diabète insipide central associé à une hyperprolactinémie et à une insuffisance corticotrope. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) hypophysaire a montré un épaississement nodulaire de la tige pituitaire associée à une glande hypophysaire augmentée de volume et à une extinction de l’hypersignal de la post hypophyse en T1.

INTRODUCTION Les tuberculomes du système nerveux central (SNC) peuvent survenir dans n’importe quelle région du SNC et à n’importe quel âge. Dans les pays développés, la tuberculose cérébrale constituait avant l’avènement des antituberculeux approximativement 30 % des lésions intracrâniennes. Elle compte actuellement 0,15 à 4 % des lésions intracrâniennes [16]. Les tuberculomes se développent habituellement au niveau du cerveau et du cervelet, mais peuvent toucher de façon plus rare la moelle, le thalamus ainsi que la région sellaire et suprasellaire [14]. Les tuberculomes sellaires et suprasellaires comme manifestations isolées de la maladie sont exceptionnels, leur diagnostic clinique ne peut être qu’une présomption. L’apparence radiologique du tuberculome n’est pas spécifique [6, 8, 11]. Ainsi, leur diagnostic dans les cas suspects cliniquement est toujours possible avec une probabilité importante dans les zones endémiques. Nous discutons ici le cas d’une tuberculose de la région sellaire révélée par un diabète insipide central.

OBSERVATION Il s’agit d’une femme âgée de 42 ans, hospitalisée en janvier 2003 au service d’Endocrinologie de Sfax pour un syndrome polyuropolydipsique d’installation brutale.

Vol. 66, n° 4, 2005

La tuberculose hypophysaire : à propos d’un cas

L’enquête étiologique a permis d’éliminer la sarcoïdose, l’histiocytose X, l’hypophysite lymphocytaire et la métastase hypophysaire. Le diagnostic retenu était celui d’une tuberculose hypophysaire. Celle-ci était évoquée devant des antécédents d’érythème noueux, une intradermoréaction à la tuberculine fortement positive, la présence de bacille de Koch (BK) dans le liquide bronchique après culture. La patiente a été mise sous quadrithérapie antituberculeuse pendant 2 mois puis sous bithérapie pendant 16 mois. Ce traitement était associé à l’hormonothérapie substitutive des déficits en ADH et en cortisol ainsi qu’à la bromocriptine. Sous traitement, l’évolution était marquée par l’amélioration de l’état général, la prise de poids, la disparition des céphalées, du syndrome PUPD et de la galactorrhée, avec normalisation de la prolactinémie. L’IRM hypophysaire de contrôle faite après 8 mois de traitement antituberculeux, a montré une disparition de l’épaississement de la tige pituitaire et une hypophyse d’aspect normal. L’atteinte tuberculeuse isolée de la région sellaire est rare. Elle fait suite à un envahissement méningé dans la quasi-totalité des cas. Le diagnostic positif reste difficile en l’absence d’autres localisations mais impératif vue la possibilité de guérison par un traitement médical précoce et bien conduit. Mots-clés : Tuberculose hypophysaire, diabète insipide central, épaississement de la tige pituitaire, traitement anti-tuberculeux.

À l’interrogatoire, on trouvait la notion de poussées d’érythème noueux aux membres inférieurs depuis 10 ans. Il n’y avait pas de notion de comptage tuberculeux. Depuis 1 mois, la patiente présentait, un syndrome polyuropolydipsique d’installation brutale, diurne et nocturne, très intense avec des entrées et des sorties chiffrées à 8,5 litres par 24 heures, associé à une aménorrhée secondaire d’installation brutale et à des céphalées holocrâniennes sans troubles visuels. À l’examen physique, la patiente avait un état général conservé et était apyrétique. Sa tension artérielle était à 120/70 mm Hg et sa fréquence cardiaque à 78 battements/mn. Son poids était stable à 53 kg pour une taille de 155 cm. Elle avait une galactorrhée provoquée bilatérale et était en eucorticisme et euthyroïdie clinique. L’examen cardio-pulmonaire, abdominal, ostéo-articulaire, neurologique et cutanéomuqueux était sans particularités. Les aires ganglionnaires étaient libres. L’examen ophtalmologique (acuité visuelle, champ visuel et fond d’œil) était normal. Les examens biologiques avaient montré une glycémie à 5 mmol/l, une natrémie à 141 mmol/l et une kaliémie à 4,2 mmol/l. L’urée était à 5,84 mmol/l et la créatinémie à 67 µmol/l. La calcémie était normale à 2,28 mmol/l ainsi que la calciurie qui était à 2,14 mmol/24h et la phosphorémie à 1,72 mmol/l. La recherche de protéinurie était négative. La numération formule sanguine avait mis en évidence une anémie normochrome normocytaire (hémoglobine = 10,5 g/dl, VGM = 82,6 et CCMH = 33,4 g/dl), un taux de globules blancs normal à 7,9103 éléments/ml dont 4,5103 éléments/ml de neutrophiles. La vitesse de sédimentation était accélérée à 91 à la première heure, la CRP était positive à 28. La densité urinaire était à 1004. L’IRM de l’hypophyse avait montré un épaississement de la tige pituitaire et du plancher du 3e ventricule avec une prise de contraste intense à ces niveaux, associé à

une glande hypophyse augmentée de volume et à une disparition de l’hyper signal spontané de la post- hypophyse en T1. Le chiasma optique était légèrement refoulé en avant par la tige pituitaire, sans autres lésions ni hydrocéphalie (fig. 1a et 1b). L’exploration des autres axes hypophysaires avait mis en évidence un déficit corticotrope partiel et une hyperprolactinémie. Les fonctions gonadotrope et thyréotrope étaient normales (tableau I). Ainsi, notre patiente présentait une polyurie hypotonique associée à un syndrome aménorrhée-galactorrhée et des céphalées, orientant alors vers une atteinte centrale. L’IRM montrant la disparition de l’hypersignal

Tableau I Résultats des explorations hormonales initiales. Table I Results of initial endocrine investigations. Temps (min)

0

30

60

90

4,3

2

4

4,4

Tests dynamiques Test à l’hypoglycémie insulinique sur cortisol Glycémie (mmol/l) Cortisol (ng/ml) ACTH (pg/ml)

154,3 155,5 181,8 131,7 35

Test TRH/TSH TSH (U/ml) (VN:0,2-6µU/ml)

0,94

FT4 (pmol/l) (VN: 2-22 pmol/l)

4,6

5,8

5,4

4

Test LHRH/FSH et LH FSH (mUI/ml)

5,4

8

9,4

10,3

LH (mUI/ml)

1,69

6,7

7,6

7,1

Oestadiolémie (pg/ml)

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