Étude analytique d’une clavicule complète de subadulte d’Homo antecessor (site de Gran Dolina, Sierra d’Atapuerca, Burgos, Espagne)

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L’anthropologie 113 (2009) 222–232 www.em-consulte.com

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Étude analytique d’une clavicule complète de subadulte d’Homo antecessor (site de Gran Dolina, Sierra d’Atapuerca, Burgos, Espagne) An analytical study of a complete subadult clavicle of Homo antecessor (Gran Dolina Site, Sierra de Atapuerca, Burgos, Spain) Rebeca García-González a,*, José Miguel Carretero a,b, Laura Rodríguez a, Asier Gómez-Olivencia a, Juan Luis Arsuaga b, José María Bermúdez de Castro c, Eudald Carbonell d, Ignacio Martínez b,e, Carlos Lorenzo b,d a Laboratorio de Evolución Humana (LEH), Departamento Ciencias Históricas y Geografía, Universidad de Burgos, Edificio I+D+I, Plaza de Misael Bañuelos s/n, 09001 Burgos, Espagne b Centro Mixto UCM-ISCIII de Investigación sobre Evolución y Comportamiento Humanos, c/ Sinesio Delgado, 4, Pabellón 14, 28029 Madrid, Espagne c CENIEH, Avda de La Paz 28, 09006, Burgos, Espagne d IPHES, Institut Catalá de Paleoecología Humana I Evolució Social, Universitat Rovira i Virgili, Pça Imperial Tarraco,1, Tarragona, Espagne e Departamento de Geología, Edificio de Ciencias, Universidad de Alcalá, 28871, Alcalá de Henares, Madrid, Espagne

Disponible sur Internet le 5 mars 2009

Résumé Cette recherche porte sur les restes squelettiques d’une clavicule d’enfant (spécimen ATD6-37) appartenant à l’espèce Homo antecessor découverte dans le niveau TD6 du site de Gran Dolina (Sierra d’Atapuerca) daté du Pléistocène inférieur. Avec un autre spécimen adulte (ATD6-50), ils nous apportent des informations consistantes sur deux aspects paléobiologiques clés concernant ces premiers hominidés : la conformation corporelle et la croissance. Basé sur des résultats analytiques, cet article propose une méthode plus précise et proportionnelle pour déterminer l’âge au décès, appliquée à la clavicule du fossile immature qui fait l’objet de la présente étude. Il avance une hypothèse sur la croissance post-crânienne et la conformation corporelle et discute des caractères et de l’âge au décès de ces premiers hominidés au travers

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (R. García-González). 0003-5521/$ – see front matter # 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.anthro.2008.12.002

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de comparaisons avec un large échantillon de dents d’immatures et de clavicules des premiers humains et des hommes modernes. # 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Croissance claviculaire ; Âge au décès post-crânien ; Hommes du Pléistocène inférieur ; Conformation corporelle ; Atapuerca

Abstract This study reports on the skeletal remains of an infant clavicle – specimen ATD6-37 – belonging to the Homo antecessor species, unearthed at Lower Pleistocene level TD6 of the Gran Dolina site (Sierra de Atapuerca). Studied alongside a further adult specimen – ATD6-50 –, they provide us with significant information on two key paleobiological aspects of these early humans: body shape and development. Based on the analytical results, the paper proposes a more accurate proportional method for determining age at death is applied to the fossilized infant clavicle under study. It goes on to hypothesize on postcranial growth and body shape and discusses morphological patterns and age at death of these early humans through comparisons with a wide range of infant dental samples and clavicular specimens in early and modern humans. # 2009 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Clavicular growth; Postcranial age at death; Lower Pleistocene humans; Body shape; Atapuerca

1. Introduction Entre 1994 et 2003, plus de 100 restes squelettiques fossilisés ont été découverts dans le niveau TD6 du site de Gran Dolina, dans la Sierra d’Atapuerca, Espagne, daté de plus de 780 000 ans (Carbonell et al., 1995 ; Parés et Pérez-González, 1995 ; Bermúdez de Castro et al., 1997, 1999a). Ces restes humains fossilisés, qui appartiennent à un minimum de neuf individus (Bermúdez de Castro et al., 2006), sont attribués à l’espèce Homo antecessor. Parmi les éléments du squelette post-crânien d’H. antecessor, trois clavicules appartiennent à trois individus : un adulte représenté par une clavicule droite (ATD6-50) et deux subadultes représentés par deux clavicules gauches (ATD6-37 et ATD6-55) (Carretero et al., 1999). ATD6-37 est une clavicule complète d’une longueur maximum de 83,7 mm, ce qui correspond à un enfant âgé de cinq à sept ans chez les H. sapiens. ATD6-55 est constitué par la moitié acromiale d’une clavicule dont la longueur totale estimée correspondrait à un enfant H. sapiens de 12–15 ans (Carretero et al., 1999). La clavicule adulte ATD6-50 est très longue en dimension absolue comparée aux échantillons d’hommes modernes, engendrant un indice de robustesse bas. Cette observation suggère que H. antecessor présentait des clavicules plus longues que celles des hommes modernes. Cette caractéristique est partagée par H. neanderthalensis et attribuée aux épaules et aux troncs relativement larges de ces hominidés (Trinkaus, 1983). Cette conformation corporelle serait également considérée comme un caractère plésiomorphe partagé par toutes les espèces d’hommes archaïques (Arsuaga et al., 1999 ; Carretero et al., 1999). La longueur relativement importante des clavicules des enfants néandertaliens remarquée par Madre-Dupouy (1992) sur le Roc-de-Marsal 1, est également évidente sur les individus subadultes d’Amud 7, de Dederiyeh 1 et de Teshik-Tash. En conséquence, l’âge au décès estimé de ces néandertaliens, basé sur les tables de croissance de la longueur maximum de la clavicule des H. sapiens, est à chaque fois surestimé (Fig. 1). C’est également le cas pour le spécimen H. ergaster KNM-WT 15000, dont la forte longueur de la clavicule surestime l’âge au décès de

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Fig. 1. Âge dentaire (surface pointillée) versus âge estimé à partir de la clavicule (surface hachurée). Dental age (dotted bars) versus clavicular age (dashed bars).

plus de trois ans (Fig. 1). La détermination de l’âge au décès des clavicules subadultes de TD6, selon leur longueur maximum, peut ainsi procurer des informations intéressantes quant à la conformation corporelle des H. antecessor et l’évolution de ce paramètre dans le genre Homo. Dans la continuité du travail de Humphrey (1998, 1999) et Thompson et Nelson (2000), une méthode proportionnelle a été utilisée pour traiter les données à la fois de l’adulte ATD6-50 et de l’individu immature ATD6-37 afin d’améliorer l’estimation directe de l’âge au décès de ATD637 qui est estimé uniquement sur la base de sa longueur maximum (voir ci-après). 2. Matériel et méthodes Les principales dimensions des clavicules de Gran Dolina ont été publiées dans Carretero et al. (1999). Afin de mener à bien l’analyse comparative, les données provenant de trois échantillons de sujets immatures d’hommes modernes ont été utilisées. Le premier échantillon est constitué d’une collection archéologique médiévale (XIIe au XIVe siècle) provenant du monastère dominicain de San-Pablo (SP) conservé au laboratoire d’évolution humaine de l’université de Burgos (Espagne). Elle comprend 53 adultes et 61 sujets immatures dont les clavicules et les dents sont bien conservées. Les âges au décès ont été estimés sur la base du degré de calcification et de formation des racines des dents parce que la minéralisation dentaire est plus fortement corrélée avec le développement du squelette que l’éruption dentaire. Les stades de minéralisation de chaque classe de dent (observés avec la radiographie conventionnelle) ont été codés en utilisant la méthode de Moorrees et al. (1963a). L’âge moyen atteint à chaque stade de minéralisation a été interpolé à partir d’un échantillon de dents d’enfants caucasiens enregistré par Anderson et al. (1976). Pour les individus de moins de trois ans, au lieu d’appliquer cette dernière méthode, nous avons utilisé celle de Moorrees et al. (1963b). Un deuxième échantillon comprend 104 individus afro-américains (60 adultes des deux sexes et 44 subadultes) d’âge au décès connu de la collection Hamman-Todd (HTH) conservé au

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muséum d’histoire naturelle de Cleveland dans l’Ohio. Enfin, les données publiées par Humphrey (1998) concernant la collection de Spitalfields (SPT) ont été également utilisées. Les clavicules incomplètes ou pathologiques des échantillons SP et HTH n’ont pas été considérées dans cette étude. En plus des collections mentionnées ci-dessus, nous avons également étudiés les fossiles suivants :  les spécimens originaux de Roc-de-Marsal (Musée national de préhistoire, Les Eyzies-deTayac, France) ;  La Ferrassie 1 (MNHN-Musée de l’homme, Paris) ;  les moulages de Amud 7, KNM-WT 15000 et Kebara 2 (également MNHN-Musée de l’homme, Paris) ;  nous avons inclus les données provenant de sources bibliographiques concernant les fossiles de Regourdou 1 (Vandermeersch et Trinkaus, 1995), Teshik-Tash (Vlcek, 1993) et Dederiyeh 1 (Kondo et Dodo, 2002). L’âge dentaire des néandertaliens immatures provient de sources bibliographiques et a été établi, à l’exception de Dederiyeh 1, à partir de tables actuelles de la croissance dentaire. Plusieurs auteurs ont observé la dyschronie dans le développement dentaire entre les néandertaliens et les hommes modernes (Tillier, 1988 ; Heim, 1986 ; Tompkins, 1996). De ce fait, l’âge dentaire des néandertaliens utilisé dans cette étude a été corrigé dans le but d’obtenir leur âge sans référence aux schémas actuels d’éruption et de formation dentaires en suivant la suggestion de Ramirez Rozzi et Bermúdez de Castro, 2004. Dans leur travail, ces auteurs ont analysé le taux de croissance de l’émail de quatre espèces humaines et montré que les couronnes dentaires des néandertaliens se forment 15 % plus rapidement que celles des hommes modernes. Cette correction a été appliquée ici à l’âge dentaire des néandertaliens immatures de Roc de Marsal (Madre-Dupouy, 1992), Amud 7 (Rak et al., 1994) et Teshik-Tash (Vlcek, 1993). Cette méthode n’a pas été appliquée à Dederiyeh 1 étant donné que son âge au décès avait été estimé à partir du comptage des périkymaties. L’âge au décès estimé en utilisant cette méthode se montre très proche de celui obtenu par la méthode développée par Granat et Heim, 2003. L’âge au décès utilisé a été relevé dans la littérature et les âges au décès corrigés sont présentés dans le Tableau 1. De façon à mener une comparaison objective de la croissance de la longueur de la clavicule dans trois espèces (H. antecessor, H. neanderthalensis, H. sapiens), les données ont été traitées en termes de proportions pour éliminer les différences bien connues dans les valeurs absolues des longueurs parmi les trois espèces. Le pourcentage de taille adulte atteinte à des âges chronologiques Tableau 1 Âge dentaire des néandertaliens juvéniles d’après les sources bibliographiques (à partir des tables de croissance dentaire chez l’homme moderne) et d’après le taux de croissance de l’émail. Dental age for juvenile Neanderthals derived from bibliographic sources (based on modern dental growth tables) and dental age for juvenile Neanderthals based on the enamel extension rate.

Amud 7 Dederiyeh 1 Roc de Marsal Teshik-Tash

Âge au décès Sources bibliographiques

Âge au décès Méthode corrigée

0,8 1,5–2,0 3,0 9,9

0,7 1,5–2,0 2,5 7,5

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successifs nous permet de comparer la croissance d’une ou plusieurs variables au sein de différentes espèces sans considérer leur taille (Humphrey, 1998 ; Thompson et Nelson, 2000). Ce pourcentage a été calculé en divisant la valeur d’une variable à un âge donné par sa valeur à l’âge adulte. Les valeurs de la longueur claviculaire à des âges successifs peuvent être calculées à partir de la moyenne des valeurs des mesures d’un groupe d’individus à un âge donné. Le problème de cette méthode est qu’elle peut être influencée par la petite taille ou le déséquilibre des individus au sein de l’échantillon (Humphrey, 1998). Pour cette raison, nous avons fait coïncider nos données (HTH et SP) avec la courbe décrivant la trajectoire de croissance de la longueur de la clavicule selon Humphrey (1998, 1999) (les données de SPT proviennent de Humphrey, 1998). De cette courbe, nous avons déduit les longueurs claviculaires estimées à différents âges. Nous aurions pu utiliser d’autres modèles pour faire coïncider nos données (SP et HTH) mais Humphrey a montré que l’équation modifiée de Gompertz (l’asymptote inférieure est forcée au zéro) permet une description précise de la croissance du squelette de l’homme moderne : y ¼ a  expðexpðb  ðx  mÞÞÞ o`u y ¼ l0 aˆ ge et a ¼ l0 asymptote sup´erieure; b ¼ la pente et m ¼ le point d0 inflexion Nous avons appliqué cette méthode en ajustant la courbe de croissance à nos échantillons (SP et HTH). Pour ajuster la courbe de Gompertz, les valeurs de départ pour les inconnues (a, b, m) de l’équation doivent être indiquées. Nous avons utilisé, dans le cadre de cette étude, les valeurs de Humphrey (1998) telles que a = la valeur moyenne adulte pour chaque variable, b = 0,2 et m = 0. Les inconnues de l’équation de Gompertz (a, b, m) ont été calculées par itération pour obtenir l’ajustement optimum pour les données de l’équation spécifiée. Les valeurs ajustées pour les R au carré ont été supérieures à 0,80 pour les échantillons SP et HTH, ce qui indique un bon ajustement pour les variables de la clavicule, et les valeurs pour l’intervalle de confiance des paramètres estimés sont à zéro ou proches de zéro, ce qui indique un modèle de régression au bruit non linéaire. Humphrey (1998), ayant montré que les différences sexuelles dans la clavicule sont présentes dès la naissance, a suggéré que cette expression du dimorphisme sexuel avant l’adolescence pourrait être caractéristique pour les variables qui mesurent la robustesse du membre supérieur. Comme ces différences ne sont pas connues chez les spécimens fossiles juvéniles, nous n’avons pas pu calculer de courbe ajustée séparée considérant le sexe des spécimens. Il n’a pas été possible d’appliquer la courbe de Gompertz aux données des néandertaliens, car toutes les classes d’âge ne sont pas représentées dans l’échantillon. De ce fait, le pourcentage de la taille adulte atteinte chez les différents néandertaliens subadultes a été calculé en divisant la taille de la variable par la taille adulte moyenne. La taille adulte moyenne des néandertaliens a été calculée à partir des spécimens de La Ferrassie 1, Kebara 2 et Regourdou 1. Cette approche n’a pas été possible pour le spécimen KNM-WT 15000 car il n’existe pas de clavicule complète d’H. ergaster dans le registre fossile. Concernant H. antecessor, nous avons calculé ce pourcentage en divisant la valeur de la longueur maximum de ATD6-37 par la valeur de cette variable chez le seul adulte connu à ce jour, ATD6-50. Cependant, ce calcul n’a pu être opéré sur l’autre clavicule immature, ATD6-55, étant donné qu’elle est incomplète. 3. Résultats et discussion Les courbes ajustées proviennent des longueurs maximums des spécimens des échantillons d’hommes actuels (SP et HTH) ainsi que des données issues de Humphrey (1998) comme présentées dans la Fig. 2. Les différences entre les courbes SPT et SP sont surtout dues aux écarts

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Fig. 2. Courbe de Gompertz décrivant le modèle de croissance pour la longueur de la clavicule versus l’âge dentaire pour San Pablo (ligne continue), âge chronologique pour Spitalfields (ligne en pointillés) et Hamman-Todd (ligne discontinue). L’équation de Gompertz pour l’échantillon de Spitalfields est tirée de Humphrey (1998). Les valeurs de l’équation de Gompertz et des R au carré pour San Pablo et Hamman-Todd sont : y = 127,37*exp(-exp(0,16*(x-0,03))) r2 = 0,85. Équation de Gompertz pour San Pablo (SP) ; y = 148,67*exp(-exp(0,15*(x-1,69))) r2 = 0,82. Équation de Gompertz pour Hamman-Todd. Gompertz curves describing the growth pattern for clavicular length versus dental age from San Pablo (continuous line), chronological age from Spitalfields (dotted line) and Hamman-Todd (dashed line). The Gompertz equation from the Spitalfields sample was derived from Humphrey (1998). The Gompertz equations and R-squared values from San Pablo and Hamman-Todd are: y = 127.37*exp(-exp(0.16*(x-0.03))) r2 = 0.85. San Pablo Gompertz equation; y = 148.67*exp(-exp(0.15*(x-1.69))) r2 = 0.82. Hamman-Todd Gompertz equation.

entre les méthodes d’estimation de l’âge au décès. Comme nous l’avons indiqué précédemment, la méthode utilisée dans l’échantillon SP est basée sur la formation de la dent et sa minéralisation alors que, pour l’échantillon SPT, les âges ont été directement renseignés à partir des données historiques (Molleson et Cox, 1993) et correspondent donc à des âges chronologiques. Clegg et Aiello, 1999 ont montré l’écart entre l’âge dentaire et l’âge chronologique dans un souséchantillon de dix individus provenant de la collection SPT. Cet écart est plus important chez les individus âgés que chez les individus plus jeunes et est reflété dans les deux courbes de croissance. La courbe de croissance HTH se positionne sous celles de SPT et SP pour les périodes périnatale et infantile. Ces différences pourraient être dues à une malnutrition des spécimens les plus jeunes comme semble le prouver la présence d’indicateurs de stress non spécifiques dans différentes parties du squelette. De plus, selon les registres apportant des informations sur les individus de cet échantillon, la cause du décès de la plupart d’entre eux peut être mise en relation avec un phénomène de malnutrition, voire même y être directement liée. Considérant les données provenant des trois courbes (SP, HTH et SPT), nous avons calculé la trajectoire de croissance pour la longueur de la clavicule sur la base des pourcentages de taille adulte atteinte (Fig. 3).

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Fig. 3. Pourcentage de taille adulte atteinte pour la longueur de la clavicule pour les échantillons de San Pablo (ligne continue), Spitalfields (ligne en pointillés) et Hamman-Todd (ligne discontinue) et les néandertaliens juvéniles (carrés). Percentage adult size attained for clavicular length in San Pablo (continuous line), Spitalfields (dotted line), HammanTodd (dashed line) and juvenile Neanderthals (squares).

Les différences dans les trajectoires de croissance des trois échantillons d’hommes modernes reflètent les différences observées dans les courbes de croissance sachant que ces trajectoires ont été obtenues à partir de chacune des courbes de croissance. La trajectoire des néandertaliens s’inscrit dans les marges de variation des trois échantillons d’hommes modernes mais ressemble plus aux courbes SPT et SP que celle de HTH. Le pourcentage de taille adulte atteinte par les néandertaliens immatures à un âge donné est semblable au pourcentage de taille adulte atteinte par les enfants du même âge des collections SPT et SP (Tableau 2). De ce fait, nous avons pu déduire l’âge au décès des néandertaliens au niveau de la clavicule à partir des trajectoires de croissance de SPT et SP. Cette méthode semble donc corriger l’écart entre l’âge au décès estimé à partir de la clavicule et l’âge dentaire étant donné qu’elle calcule un âge au décès pour les enfants néandertaliens qui est très proche de leur âge dentaire estimé (Tableau 2). Tableau 2 Pourcentage de taille adulte atteinte par les néandertaliens juvéniles et leur âge au décès à partir des trajectoires de croissance des séries de San Pablo et de Spitalfields. Percentage adult size attained by juvenile Neanderthals and their age at death derived from the San Pablo and Spitalfields growth trajectories.

Amud 7 Dederiyeh 1 Roc de Marsal Teshik-Tash

% taille adulte

Âge à partir des trajectoires de San Pablo (SP)

Âge à partir des trajectoires de Spitalfields (SPT)

35,7 44,3 49,0 70,2

0,4 1,3 2,2 6,6

0,5 2,1 3,6 8,4

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Le pourcentage de taille adulte atteinte par le spécimen ATD6-37 est de 51,83 %. Selon Bermúdez de Castro et al. (1999b, 2003), H. antecessor montre déjà un modèle de développement dentaire de type homme moderne, ce qui fait que ce pourcentage a été comparé en toute sécurité à ceux obtenus à partir des trajectoires de croissance des échantillons d’hommes modernes. Il a également été comparé avec les enfants néandertaliens une fois leur âge au décès corrigé par le facteur de 15 % mentionné ci-dessus étant donné la vitesse de formation des couronnes dentaires des néandertaliens. Environ 51,83 % de la taille adulte est atteint par des enfants de 2,2 ans parmi l’échantillon de SP et de 3,6 ans parmi les enfants de SPT. Comme la méthode proportionnelle corrige la différence entre l’âge dentaire et celui estimé à partir de la clavicule chez les néandertaliens, il est raisonnable de proposer que cette méthode soit également appliquée au spécimen ATD6-37. De plus, la comparaison des autres dimensions de la clavicule de ATD6-37 avec un sous-échantillon de la collection de SP, dont l’âge est compris entre deux et quatre ans, montre que ATD6-37 est plus proche du groupe âgé de trois ans pour toutes les variables (Tableau 3). Comparé aux enfants de deux ans, il apparaît très grand. D’un autre côté, comparé à des enfants de quatre ans, il présente des valeurs plus fortes pour le diamètre maximum de l’épiphyse sternale, le diamètre maximum de la diaphyse dans sa partie proximale, le diamètre minimum au milieu de la diaphyse, la hauteur de l’acromion, le diamètre minimum de la facette acromiale et le diamètre minimum au niveau du conoïde. Cependant, les dimensions de ATD6-37 sont plus proches de celles d’un enfant de trois ans. La plupart des variables pour ce spécimen se situe à moins d’un écart-type des valeurs des enfants de trois ans de SP. C’est uniquement du fait de son importante longueur maximum, que le spécimen ATD6-37 présente un indice de robustesse et un indice de largeur acromiale plus faibles que ceux des enfants de trois ans de la collection de SP. En résumé, au regard des données présentées, nous proposons que ATD6-37 appartienne à un enfant de deux à quatre ans plutôt que de cinq à sept ans, comme suggéré par la longueur absolue de sa clavicule, et que H. antecessor partage avec les néandertaliens une clavicule relativement plus longue que celle des hommes modernes. Basant leurs découvertes sur de nouveaux restes Tableau 3 Z-scores des 15 variables de la clavicule pour le spécimen ATD6-37 de Gran Dolina relativement à la moyenne du souséchantillon de San Pablo. Z-scores of 15 clavicular variables for ATD6-37 clavicle from Gran Dolina relative to the San Pablo sub-samples mean.

Diamètre maximum de l’épiphyse sternale Diamètre minimum de l’épiphyse sternale Diamètre maximum de l’axe proximal Diamètre minimum de l’axe proximal Circonférence de l’axe proximal Diamètre maximum de la partie centrale de l’axe (AP) Diamètre minimum de la partie centrale de l’axe (SI) Circonférence de la partie centrale de l’axe Largeur de l’acromion Hauteur de l’acromion Diamètre maximum de la facette acromiale Diamètre minimum de la facette acromiale Diamètre minimum du conoïde (SI) Diamètre maximum du conoïde (AP) Circonférence du conoïde

2 ans

3 ans

4 ans

3,45 0,42 2,54 0,74 2,49 2,58 1,55 1,63 0,45 0,07 1,80 4,62 2,03 0,49 1,12

1,94 1,06 0,72 0,45 0,27 0,68 0,97 0,81 0,06 2,49 1,00 2,25 0,91 1,60 0,71

1,90 1,21 2,01 0,16 0,28 0,56 2,68 0,37 0,26 3,17 1,43 4,07 2,15 0,01 0,13

Zéro : la moyenne du sous-échantillon et les déviations par rapport au zéro sont converties en Z-scores.

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dentaires, Bermúdez de Castro et al. (2006) ont déterminé, parmi les restes humains de Gran Dolina, deux enfants entre cinq et neuf ans (Hominid 5 et Hominid 8) et trois autres entre zéro et quatre ans (Hominid 2, Hominid 6 et Hominid 9). C’est à ces derniers qu’il est raisonnable d’attribuer la clavicule ATD6-37. 4. Conclusions Bien que nous soyons conscients que l’échantillon fossile est réduit et que les échantillons d’hommes modernes considérés dans cette étude n’illustrent qu’une partie de la variabilité de notre espèce, les résultats obtenus suggèrent qu’un âge au décès pour le spécimen ATD6-37 de Gran Dolina, représenté par une clavicule sub-adulte, peut être estimé à partir de comparaisons avec les trajectoires de croissance de l’homme moderne et du spécimen ATD6-50. Du fait, chez les néandertaliens, d’une longueur importante de la clavicule relativement à la taille corporelle, l’âge au décès estimé à partir de la longueur absolue de la clavicule excède toujours l’âge dentaire quand le modèle de référence est celui de l’homme moderne. C’est le cas des néandertaliens subadultes du Roc de Marsal, Dederiyeh 1, Amud 7 et Teshik-Tash, les seuls qui présentent simultanément des éléments dentaires et une clavicule complète. C’est également le cas pour le garçon de Nariokotome qui est un H. ergaster. Cependant, la différence entre l’estimation des âges à partir des dents et de la clavicule est éliminée chez les néandertaliens quand une méthode proportionnelle pour estimer l’âge au décès est utilisée à partir de la longueur de la clavicule. Quand la proportion entre la longueur moyenne de la clavicule des néandertaliens subadultes et adultes est utilisée et que l’indice est interpolé avec les courbes de croissance de la longueur de la clavicule des H. sapiens, les âges dentaires et claviculaire coïncident beaucoup plus chez les quatre néandertaliens considérés. La clavicule du subadulte ATD6-37 de Gran Dolina présente un stade de développement équivalent à un enfant actuel de cinq à sept ans quand ses dimensions sont directement introduites dans les tables de croissance de la longueur de la clavicule des H. sapiens mais est plus proche d’un enfant de deux à quatre ans quand la méthode proportionnelle décrite ci-dessus est utilisée. Considérant les données disponibles sur le développement des néandertaliens et des H. antecessor (Bermúdez de Castro et al., 1999b ; Ramirez Rozzi et Bermúdez de Castro, 2004) de même que les comparaisons métriques de ATD6-37 avec ces derniers et les hommes modernes, la classe d’âge de deux à quatre ans apparaît la plus probable pour l’âge au décès du spécimen ATD6-37. Si cette estimation est correcte, ATD6-37 correspond à une clavicule très longue pour un enfant actuel dont l’âge biologique (développement dentaire) est semblable, ce caractère serait alors partagé avec les néandertaliens. En effet, les spécimens ATD6-37 et ATD650 présentent une clavicule particulièrement longue, ce qui confirme cette observation. Ce caractère des néandertaliens est probablement à mettre en relation avec la largeur plus importante de leur corps par rapport à celui de l’homme moderne. Selon les auteurs, la gracilisation corporelle de l’homme moderne est un caractère spécifique de notre espèce, ce qui constitue un caractère dérivé au niveau de la conformation corporelle (Arsuaga et al., 1999 ; Carretero et al., 2004), alors que tous les hominidés archaïques depuis H. ergaster présentent un tronc très large et un corps lourd (conformation corporelle plésiomorphe), ce qui est également mis en évidence par les études réalisées sur les restes de pelvis (Rak et Arensburg, 1987 ; Rosenberg, 1998 ; Arsuaga et al., 1999 ; Carretero et al., 2004). La morphologie et les proportions générales des clavicules subadultes et adultes d’H. antecessor, proposé comme l’ancêtre commun des néandertaliens et des hommes modernes, nous orientent vers la présence, également dans cette espèce, d’épaules et de troncs larges, ce qui renforce notre hypothèse. L’évolution de la conformation corporelle

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coïncide avec le modèle d’évolution dit des équilibres ponctués et se caractérise par une longue période de stase évolutive au moins depuis l’apparition d’H. ergaster, il y a 1,8 million d’années au corps large, lourd et robuste, suivie par un événement de spéciation il y a 200 000 ans avec l’apparition soudaine d’une « nouvelle » espèce humaine avec un « nouveau » schéma corporel, les « hommes éclairés », nommés H. sapiens par Linné en 1758. Remerciements Nous sommes reconnaissants envers nos collègues de l’équipe de recherche d’Atapuerca et spécialement envers ceux qui fouillent le site de Gran Dolina. Nous remercions également Yohannes Hailé-Selassié (Cleveland Natural History Museum), Philippe Mennecier (Musée de l’Homme, MNHN, Paris) et Jean-Jacques Cleyet-Merle (Musée national de Préhistoire, Les Eyzies-de-Tayac, Dordogne) pour nous avoir permis d’accéder aux collections placées sous leur responsabilité. Nous sommes également redevables à Aurélie Fort, Lyman Jellema et André Morala pour leur accueil et leur assistance ainsi qu’à Fernando Urquijo pour les radiographies des dents et des mandibules et à D. Dirkmaat, S.A. Symes, L. Cabo et leurs étudiants du Forensic Anthropology graduate program au Mercyhurst College (Erie, Pennsylvanie) pour leur aide dans la collecte des données de la collection HTH. Enfin, une mention spéciale de remerciement revient à Ciarán Brewster pour avoir revu la traduction en anglais de cet article. Cette recherche a été financée par le ministère de la Science et de la Technologie (projet no CGL 2006-13532 C0301 ; C03-02 ; C03-02). Les fonds pour le travail de terrain proviennent de la Junta de Castilla y León et la Fondation Atapuerca. L’essentiel du support logistique est dû au groupe spéléologique Edelweiss. Rebeca García-González, L. Rodriguez et A. Gómez-Olivencia sont boursiers respectivement de la Fondation Atapuerca, Fondation Siglo para las Artes de Castilla y León et du ministère de la Science et de la Technologie. La traduction en français du texte a été réalisée par Amélie Vialet. Références Anderson, D.L., Thompson, G.W., Popovich, F., 1976. Age of attainment of mineralization stages of the permanent dentition. Journal of Forensic Sciences 21, 191–200. Arsuaga, J.L., Lorenzo, C., Carretero, J.M., Gracia, A., Martínez, I., García, N., Bermúdez de Castro, J.M., Carbonell, E., 1999. A complete human pelvis from the Middle Pleistocene of Spain. Nature 399, 255–258. Bermúdez de Castro, J.M., Arsuaga, J.L., Carbonell, E., Rosas, A., Martínez, I., Mosquera, M., 1997. A hominid from the Lower Pleistocene of Atapuerca, Spain: Possible ancestor to Neandertals and modern humans. Science 276, 1392–1395. Bermúdez de Castro, J.M., Carbonell, E., Arsuaga, J.L. (Eds.), 1999a. Special issue on Gran Dolina site: TD6 Aurora Stratum (Burgos, Spain). Journal of Human Evolution 37, 309–700. Bermúdez de Castro, J.M., Carbonell, E., Gómez, A., Mateos, A., Martinón-Torres, M., Muela, A., Rodríguez, J., Sarmiento, S., Varela, S, 2006. Paleodemografía del hipodigma de fósiles de homínidos del nivel TD6 de Gran Dolina (Sierra de Atapuerca, Burgos): estudio preliminar. Estudios Geológicos 62, 145–154. Bermúdez de Castro, J.M., Ramírez Rozzi, F., Martinón-Torres, M., Sarmiento Pérez, S., Rosas, A., 2003. Patterns of dental development in Lower and Middle Pleistocene hominins from Atapuerca (Spain). In: Thompson, J.L., Krovitz, G.E., Nelson, A.J. (Eds.), Patterns of growth and development in the genus Homo. Cambridge University Press, Cambridge, pp. 246–270. Bermúdez de Castro, J.M., Rosas, A., Carbonell, E., Nicolás, M.E., Rodríguez, J., Arsuaga, J.L., 1999b. A modern human pattern of dental development in Lower Pleistocene hominids from Atapuerca-TD6 (Spain). Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America 96, 4210–4213. Carbonell, E., Bermúdez de Castro, J.M., Arsuaga, J.L., Díez, J.C., Rosas, A., Cuenca-Bescós, G., Sala, R., Mosquera, M., Rodríguez, X.P., 1995. Lower Pleistocene hominids and artifacts from Atapuerca - TD6 (Spain). Science 269, 826– 830.

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